Eugène Maître (1887-1978)
À la fin de la Grande Guerre, beaucoup de Suisses passent la frontière pour travailler et vivre à Annemasse. Il y a cent ans, près de 13% de la population annemassienne est suisse ! De nombreuses industries et artisans s’installent à Annemasse, parmi lesquels plusieurs industriels suisses (Tavelli et Bruno, Rodé Stucky, Hess, Kuckler, etc. ) mais aussi des entreprises françaises comme l'entreprise de décolletage d'Eugène Maître.
Les établissements Maître et l’emploi à Annemasse
Eugène Maître est lyonnais. Après avoir créé un établissement en 1913 dans la Vallée de l’Arve, il choisit d'implanter une usine à Annemasse en 1919, chemin des Tournelles. Il la bâtit dans le quartier de la gare, qui est alors la deuxième zone industrielle de la Ville. Située à proximité des chemins de fer, PLM (Paris Lyon Méditerranée) et Chemin de Fer économiques du Nord, l’usine se nomme à l’origine « La précision décolletage » et produit de la visserie pour les industries, des pièces spéciales pour l’automobile, l’aviation, la marine, la TSF, le marché textile, les appareils optiques, les machines à écrire, pompes à injection et fabrication d’armement. La production journalière en 1937 est de 300 000 pièces, usinées sur 150 tours automatiques. L’établissement pratique aussi le contrôle d’usinage.
Avant-guerre, l’on constate des périodes de creux au niveau de l’emploi. Environ 200 licenciements sont enregistrés en 1938, dont 70% de licenciés résidant à Annemasse. Mais l’établissement Maître reste un employeur important de la Ville. Au premier septembre 1939, le bureau de placement d’Annemasse enregistre 476 demandes d’emploi pour les usines Maître, dont 192 hommes et 284 femmes.
Seconde Guerre mondiale
Au début de la Seconde Guerre mondiale, l’usine Maître est identifiée par la Préfecture comme un établissement susceptible de participer à l’effort de guerre et elle fonctionne jour et nuit. Les établissement Maître travaillent alors pour l’armée et produisent entre autre des éléments de fusées. Le 12 octobre 1940, un arrêté municipal témoignage de l’agrandissement de l’usine, une annexe étant ajoutée. À l’arrivée des Allemands, le « Rustungskommando » recense l’établissement parmi les usines prioritaires « S » et l’établissement est chargé de sa propre défense. À l’époque la défense anti-bombardements relevait de la Défense passive, assurée par un service communal.
Après-Guerre : des hauts et des bas
Jusqu’en 70, les effectifs dans l’industrie continuent à augmenter à Annemasse avec des filiales de groupes français et étrangers comme Gay frères, Aspro, les Charmilles et des entreprises familiales locales telles que Vuarchex, Lachenal, Terraillon ou encore Maître. En 1955, un nouvel agrandissement de l’usine Maître est réalisé par un architecte local, Fernand Decock, sur la parcelle située Chemin des tournelles. Enfin en 1971, l’établissement prend encore de l’ampleur avec l’installation de douches, de nouveaux vestiaires et la création d’un restaurant Cependant, le secteur connaît une crise importante dans les années 70, provocant plusieurs faillite et la fin de l’industrie horlogère. Les sociétés familiales cèdent leur place à des groupes. Quelques industries, dont l’usine Maître, résistent encore. Mais en 1991, une nouvelle crise a d’importantes répercussions sur le secteur du décolletage. Poussés par l’industrie automobile, qui est un de leurs principaux clients, les entreprises de décolletage se regroupent. L’entreprise Maître est absorbée par le groupe I.F.I. (Iena Finance et Industries). Les groupes IFI, Ballofet et la Clusienne fédèrent leurs activités en créant Eurodec Industrie. L’usine d’Annemasse est fermée.
Pour un approfondissement de l'histoire du décolletage en Haute-Savoie